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En Pommel II-01 Démolition d’une cuisine et d’un séjour - Chronique d’un gachis !

Publié le 5 septembre 2007, mise à jour le 13 janvier 2011
par Luc Floissac

Poutre rongée

Notre maison est une ferme bâtie :

  • avec des soubassements en pierres et briques de terre cuite.
  • avec des murs en
    • en briques de terre cuite et pierres au sud.
    • en terre crue au nord, est et ouest.

Le plancher entre le RDC et le grenier est en pin, les chevrons en sapin, les poutres porteuses en peuplier.

Dans les années 1950, la maison a sans douté été rénovée. Des enduits de ciment ont été appliqués à l’intérieur et à l’extérieur. Une peinture au plomb a été passée à l’intérieur.

En 1988, notre cuisine et notre salle de séjour ont été rénovés de la manière la plus conventionelle en plaques de plâtre / rails métalliques avec isolation intérieure en laine de verre et polystyrène.


20 ans après, le résultat n’est pas brillant :

  • La maison est humide au nord et à l’ouest.
  • Les souris se baladent dans les contre-cloisons et grignotent l’isolation.
  • Des billes de polytyrène volètent légérement de temps en temps.
  • Les doublages ont un look rectiligne et "cheap" qui donne l’impression de vivre dans un bâtiment "vite fait mal fait" comme on en construit des centaines de milliers dans notre beau pays.

Conclusion : il est urgent de changer cela et de retrouver du plaisir à habiter une maison.


Après avoir brièvement envisagé de se contenter de sabler les boiseries et de remplacer les plaques de plâtre par des enduits nous avons décidé de faire les choses sérieusement ! Les travaux planifiés sont donc les suivants :

  • Démolition des doublages.
  • Démolition des enduits en ciment (peints au plomb à l’intérieur).
  • Démolition du plancher.
  • Remplacement d’une partie des radiateurs à eau par des murs chauffants.
  • Remplacement des linteaux et poutres abimés.
  • Dépose / repose du réseau électrique.
  • Dépose / repose des menuiseries à l’extérieur des murs porteurs.
  • Réalisation d’enduits extérieurs en terre et / ou chaux.
  • Isolation par l’extérieur.

Démolition / démontage

Nous nous sommes efforcés de réaliser une opération qui va permettre de récupérer le maximum de matériaux... Nous allons voir que c’est plus faile à dire qu’à faire !

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David découpe les plaques de platre
Les plaques de plâtre sont découpées avec une masse à bord tranchant avant d’être arrachées.

Les doublages :

La démolition de doublages de plaques de plâtre vissées sur des rails métalliques est un vrai gachis. Il faut arracher les plaques, les casser... elles sont mûres pour la poubelle ! Les rails metalliques sont généralement tordus par la démolition des plaques. Ils sont eux aussi majoritairement murs pour la poubelle !

Les panneaux de laine de verre sont imprégnés d’humidité lorsqu’ils sont à moins de 50 cm du sol.

Les panneaux de laine de verre et les plaques de polystyrène sont traversés de galeries creusées par les rongeurs qui semblent sé délecter avec ces matériaux.

Protégés d’un masque, nous avons retirés ces matériaux avec dégout. Tout cela est parti à la poubelle, quel gachis !

Le plan de travail de la cuisine

L’évier collé au sillicone sur un carrelage collé à une plaque d’aggloméré marine (en cours de pourissement) a été cassé lors de son démontage. Direction poubelle...

Les carreaux de faience collés au ciment-colle n’ont pu être détachés, destination poubelle...

Le réseau électrique

La majorité du réseau électrique, des prises de courant et des interrupteurs ont été démontés sans difficultés. Seules les boîtes destinés à être encastrées dans un doublage partirons...à la poubelle...

Le plancher et les poutres entre le RDC et le grenier

Bons petits soldats, nous avions soigneusement imprégnés nos bois anciens de lasures anti xylophages.

  • Le plancher

Le traitement chimique n’a pas arrêté ces chères bestioles qui ont grignoté notre vieux plancher en pin. En revanche, nous l’avons respiré pendant quelques années et il est inenvisageable de brûler tout ce bois dans le poele. Il va donc partir... à la poubelle...

  • Les chevrons

Les vieux chevrons en sapin qui avaient étés lasurés et paints ont été rabotés malgré la présence de restes de clous. Nous y avons abimé 2 paires de lames pour rabot électrique afin d’avoir la satisfaction de revoir du vrai bois, ancien de surcroit et moucheté de piqures de vers qui n’ont en rien entamé sa solidité.

  • Les poutres

Les trois poutres qui portent le plancher suscitaient notre inquiétude depuis longtemps. Piquées par les vrillettes elles semblaitent en mauvais état. Nous les avons donc tronçonnées et démontées à l’aide de palans.

Et là surprise :
- Contrairement aux apparences, les insectes n’ont pas entamé en profondeur le bois. Une fois l’aubier passé celui-ci est très convenable.
- En revanche, 2 des 3 poutres sont totalement bouffées à l’une de leur extrémité :

    • La première, dont l’extrémité posée sur un mur porteur (en terre-crue enduite au ciment) orienté au nord est rongée sur 30 cm. Pourtant, l’enduit extérieur semble correct et aucune goutière ne semble affecter ou avoir affecté cette partie de la maison. Après réflexion, l’hypothèse la + vraissemblable est que cette poutre enfoncée profondément dans le mur (et donc très proche de l’extérieur) est régulièrement soumise au point de rosée. En effet l’interface entre le mur et la poutre n’est pas étanche à l’air. L’air chaud de la pièce doit donc condenser de manière privilégiée à cet endroit. La présence régulière d’humidité est une bénédiction pour les xylophages qui se déchainent sans retenue.
    • La seconde repose sur deux murs de refends situés tous les deux à l’intérieur de la maison. L’une des extrémité de la poutre est intacte alors que l’autre est proche de l’agonie. Totalement rongée dans la partie où elle repose sur le mur (40 cm environ) elle est percée par les insectes et creusées par les souris qui y ont aménagé un nid douillet en laine de verre ! Ici, c’est une autre explication, cette poutre est située sous une gouttière que nous avons découverte lors de l’achat de la maison (il y a 20 ans), le mal était sans doute déjà fait. Ici aussi, il semble que ce soit l’humidité qui ait provoqué les attaques des xylophages puis des rongeurs. En effet, les autres extrémités de poutres sont tout aussi accessibles et sont pourtant en parfait état. De la même manière les nombreux chevrons enfoncés légèrement dans le mur extérieur n’ont subis aucuns dommages.

Compte tenu de la nouvelle configuration de la cuisine, une des poutres a pu être raccourcie. Rabotée, elle a été remise en place (sur le mur extérieur là où elle a posé problème). A titre de précaution, nous l’avons entouré de plaques de liège afin de mieux l’isoler mais surtout elle sera désormais derrière une isolation extérieure (et donc a priori protégée du risque d’atteinte du point de rosée).


Bilan démolition / démontage

Les doublages sont de formidables cache-misère et de véritables autoroutes à souris... Les abattres pour ne pas les remplacer est un véritable soulagement.

L’isolation intérieure couplée à des enduits de ciment à l’extérieur a provoqué et amplifié les désordres. Le mélange très douteux entre un bâti ancien et des matériaux conventionnels est esthétiquement discutable et constructivement proche de l’absurdité.

Le bilan environnemental de cette opération est lamentable : Ce sont environ 25 m3 de matériaux que nous avons amené à la déchetterie !

- les enduits ciments peints au plomb sont partis à la déchetterie rayon "gravats".
- les enduits de ciments non peint empierreront notre chemin.
- les pierres et briques de démolition ont été triés. Les meilleures seront réutilisées dans la construction, les autres cassées à la masse empierreront notre chemin.
- les adobes sont stockées. Elles seront plongées dans l’eau pour être fondues et seront directment utilisées pour faire les enduits de finition (la terre qui les constitue est déjà tamisée).
- la totalité du doublage est parti à la déchetterie :

    • les plaques de plâtre, le polystyrène, la laine de verre au rayon "tout venant".
    • les rails mettaliques à la déchetterie, rayon "métal".

- Les bois

    • Les bois traitrés et abimés sont paris à la déchetterie rayon "bois".
    • Les bois traités récupérables ont été rabotés puis réutilisés.

Durée :
- 1 journée de démolition à 3 personnes.
- 1/4 journée à la déchetterie à 2 personnes.


Que deviennent les matériaux ?

Les personnes qui travaillent dans les déchetteries font leur travail très sérieusement. Malheureusement, lorsque les déchets leur arrive il est pour l’essentiel trop tard, la pollution a été produite, il faut donc se débrouiller avec !

  • Le tout-venant va dans un trou ! Aucune valorisation possible donc. Il est évident que ces déchets supposés inertes contiennent de nombreux polluants qui partiront lentement dans l’environnement.
  • Les gravats sont un peu plus utiles, ils bouchent des trous eux aussi mais servent au moins de couche de préparation.
  • Le métal est trié et recyclé.
  • Le bois est broyé puis brûlé dans une chaudière. Il est très probable qu’une bonne partie des polluants contenus dans ses traitements repartent dans l’atmosphère.

Comment faire autrement

La vue de ce gachis amène à se poser des questions.

En effet, il semble difficilement concevable de mettre à la poubelle des matériaux mis en oeuvre seulement 20 ans auparavant. Pourtant c’est ce que nous faisons tous ou presque !

Quelques pistes de solution

Commes d’autres nous nous sommes efforcés de prendre en compte les leçons de nos erreurs pour essayer de faire mieux en :

  • Récupérant certains matériaux :
    • Une partie des poutres et la totalité des chevrons.
    • Les briques cuites pleines anciennes et certaines pierres.
    • Les adobes qui seront refondues et utilisées dans les enduits de terre.
  • Utilisant des matériaux locaux et peu transformés :
    • Terre du jardin pour les enduits.
    • Paille d’un voisin pour l’isolation extérieure.
  • Utilisant des techniques qui faciliteront le démontage et la réutilisation directe :
    • Un mur, un carrelage, une faience montés à la chaux peuvent être démontés sans être cassés. Nos colles et ciments modernes sont beaucoup trop durs, nous confondons bêtement dureté et solidité !
    • Bois brut (direct de la scierie), non traité, non teinté.

Bien sûr, nous n’atteindrons pas la perfection mais il est possible et facile de faire mieux qu’aujourd’hui en ayant en plus la satisfation :
- de dépenser moins.
- de vivre dans un environnement plus sain.
- de favoriser l’économie locale.
- d’avoir des bâtiments plus beaux et moins impersonnels que la production conventionelle contemporainne.


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