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Retour sur les fondations cyclopéennes

Publié le 4 février 2021

Nous avons reçu en décembre 2020 sur l’adresse mèl d’ARESO, une demande intitulée "renseignements fondation cyclopéenne". L’échange qui a suivi permet d’actualiser cette aspect de la construction, déjà traité par ARESO.

"Bonjour,

Avec ma compagne, nous avons comme projet de construire notre maison minimisant au maximum l’empreinte carbone (construction/exploitation/destruction).

Nous avons basé notre projet sur une construction ossature bois et remplissage paille. Afin, de calmer nos derniers doutes et finaliser nos choix techniques avant dépôt du permis de construire, nous avons quelques questions sur le choix des fondations, qui pour l’instant partent sur le principe des fondations cyclopéennes.

Tout d’abord, avez-vous un retour d’expérience du comportement de celles-ci sur un sol argileux (aléa faible à moyen) ? Par ailleurs, sur le montage de ce type de fondation, est-ce mieux un montage dit "en parpaings (avec des pierres+coffrage)" ou en "vrac" tassé avec un béton romain ?

Aussi, une armature en bambou est-elle conseillée ? Qu’en est*il de l’ajout de pieux en mélèze pour venir fixer la dalle bois ?

Enfin, si la technique de fondation cyclopéenne n’est pas adaptée au sol argileux, avez vous une autre alternative ?

Bien cordialement,

Matthieu"

Filio Gaspar, membre d’ARESO et rédacteur de fiches d’élements d’ouvrage (FEO) a indiqué à Matthieu des documents disponibles sur le site d’ARESO (FEO 01, FEO 02, FEO 46) et sollicité Patrick Charmeau, le rédacteur de la première et la seconde FEO.

Réponse de Patrick :

"Bonjour Matthieu

J’ai en effet réalisé des fondations cyclopéennes pour ma maison de Castanet. Sur sol argileux, et dans un terrain en pente, je vous renvoie sur les détails de la réalisation dans la FEO indiquée par Filio.

(Pour rappel les auteurs des fiches sont directement joignables par le lien en haut de page sur le site ...)

Le résultat est complètement satisfaisant ici :

Même s’il faut préciser qu’avec une maison relativement lourde, l’ensemble de la maison s’est fendue en 2 dans les 2 ans qui ont suivi sa construction : le sol s’est équilibré en pression sous son poids. Les contreforts Sud ont bien joué leur rôle de blocage coté pente. Il en est résulté une fente de 0,5 à 1,5 mm entre l’avant Sud de la maison et tout le reste. Mais heureusement pas de conséquence sur les sols carrelés puisque dalles posées sur le sol-hérisson et désolidarisées des murs. Cela n’a pas bougé depuis 2000.

Il faut avoir en tête que c’est l’humidité du sol naturel qui peut poser problème sur ces terrains argileux, notamment par les variations entre l’été et l’hiver. D’où l’absolu priorité à régler les sources de ces variations de cette humidité : de bon drainages périphériques et une bonne évacuation des eaux de ruissellement venant des toitures et des sols environnants. Il faut bannir en particulier les toitures sans gouttières !

Une technique intéressante pour stabiliser saisonnièrement l’humidité du sous-sol est celle du « trottoir périphérique isolé » prôné et mis en oeuvre depuis des années par la scoop Inventerre : "Depuis que chez Inventerre SCOP, on a essayé le système des trottoirs isolants autour des maisons, nous sommes vraiment convaincus de la pertinence de ne surtout pas mettre d’isolant sous les sols du rez de chaussée pour garder du frais à irradier dans la maison pendant l’été. L’isolant périphérique dans le trottoir protège la masse de terre qui est sous la maison du refroidissement de l’hiver, le trottoir écarte la pluie de l’argile proche de la maison, ce qui permet aux fondations d’être beaucoup moins sollicitées." (Extrait d’un échange à propos de la mise en place de dalles de terre crue sur le site d’ARESO)

Pour résumer : elle consiste à faire un décaissement autour du bâtiment de 40 cm de profondeur sur plus d’un mètre de large en pente légère vers l’extérieur, y sont placés des galets de verre expansé sur 30 cm, une membrane Epdm couvre l’ensemble (pente toujours vers l’extérieur), on recouvre l’ensemble soit d’une couche de galets de Garonne soit d’un petit trottoir de béton coulé en place. Cet ouvrage permet en même temps d’isoler thermiquement le sol périphérique et donc éviter des pertes thermiques par le sol du rdc, de stabiliser l’humidité du sous-sol et de permettre un espace de circulation propre autour de la construction.

Quant à la fondation cyclopéenne :

- Montage type « parpaings » ou « vrac » Cela dépend beaucoup des détails et de la géométrie de vos fondations. Difficile d’estimer un « mieux » dans ce cas ! Photo 1

- je n’utiliserai plus de bambous en guise d’armature, durabilité trop incertaine. Ici démonstration faite par des travaux divers de percement de ces fondations (réalisées en 1993) que les canes de bambous ne sont pas durables même dans une matrice de chaux aérienne comme ici.

- les pieux que j’y ai intégrés n’étaient pas non plus suffisamment durables (chataignier piquet brut) : il eu fallu utiliser du coeur de robinier comme ce que j’utilise couramment dans mes aménagement de jardin comme pièces maitresses de murs de soutènement (photo 1 ci-dessus). Coeur de robinier purgé d’aubier (à la plane, photo 2 ci-dessous) qui doit rester dans une matrice le plus anaérobie possible. Le mieux est de passer au feu les parties qui sont dans le sol (photo 3).

Le mélèze pourquoi pas mais selon l’endroit où vous êtes, ça peut être plus cher que des piquets de robinier ! et pas du tout aussi durable … Photo 2

- De plus vous indiquez vouloir fixer votre dalle bois (plancher rdc je suppose ?) 2 points sont à surveiller-calculer : 

> Mécaniquement on cherche habituellement à ce que les charges du plancher soient le plus réparties linéairement sur les fondations et surtout pas créer des points de charge sous lesquels la réaction du sous-sol est plus incertaine … d’où l’intérêt de la lisse basse dont le rôle est tout d’abord de répartir les charges et en second lieu de résister aux efforts de soulèvement et de poussée dûs au vent.

>Attention à ne pas transmettre de l’humidité à la dalle bois qui pourrait remonter des fondations via ces pieux, voire d’entrée de xylophages, termites ou mérule notamment.

Alternatives à ces fondations : les pierres vibrées ou « colonnes ballastées » , infos passées par Luc Floissac en 2008, je vous remet son mail plus bas.

Amicalement Patrick Photo 3

La réponse de Patrick était accompagnée d’un message de Luc Floissac (daté du 5 mars 2008) :

"Le sujet des fondations alternatives au béton de ciment préoccupe beaucoup d’entre nous. Lui substituer d’autres solutions + écologiques mais pas trop chères n’est pas évident.

Il faut aussi ne pas oublier que les fondations traditionnelles (très peu profondes) en maçonnerie de pierres hourdées à la chaux ont fait leur preuve et ont un bon bilan écologique. Malheureusement d’un point de vue règlementaire cela ne passe pas.

Le béton romain ne me semble pas avoir un très bon bilan écologique en raison de la grande quantité de chaux nécessaire.

Une solution plus technique mais satisfaisante d’un point de vue écologique pourrait consister en la réalisation de fondations sur colonnes ballastées. voir http://www.mtpnet.gov.ma/NR/rdonlyres/17F48F90-02BB-4DA2-B42A-2213394AF72B/902/501Am%C3%A9liorationdessolsdefondationparcolonnesballas.pdf (la page n’existe plus)

On notera que la réalisation de ce type de fondations nécessite de gros engins dans le cas de grands bâtiments.

Il est possible que pour une maison individuelle cela puisse être réalisé avec des moyens plus modestes (tassement à la main / fouloir pneumatique / pelle mécanique avec appendice adéquat...).

Cordialement.

Luc Floissac"


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